- Benjamin Anderson
Me, myself and I
Popularité:
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Crimes et Délits:
Ben Anderson
« Je lui adressai même un sourire bien peu protocolaire, un de mes sourires canailles,
conçus afin de rappeler aux coeurs féminins qu'ils ont une fâcheuse tendance à battre
pour les méchants garçons. »
conçus afin de rappeler aux coeurs féminins qu'ils ont une fâcheuse tendance à battre
pour les méchants garçons. »
ONLY YOU
AT YOUR SCHOOL
CLASSE
Year 13MATIÈRES SUIVIES
Histoire, Littérature, Français, éducation religieuse et Dessins.CLUBS INTÉGRÉS
Je suis le président du club de Dessin et je suis dans le club de théâtre.SPORTS PRATIQUÉS
Je fais de l'athlétisme, de la course et de l'escalade, du tir et de la danse.ÉTUDES ENVISAGÉES
Ce n'est pas pour moi...NO PRIVACY
Eau ou Whisky ?
WhiskyMariage ou Volage ?
VolageCigarette ou Bonbon ?
CigaretteSage ou Rebelle ?
RebelleSucré ou Salé ?
SaléCinéma ou Télé ?
CinéLivre ou Soirée ?
SoiréeIntello ou Sportif ?
Les deux ? Blonde ou Brune ?
BlondeÉcole ou Vacances ?
VacancesAmoureux ou Solitaire ?
Aucun des deux !Devoirs ou Sorties ?
Sorties PHYSICAL
Couleurs des yeux et cheveux
Bruns/Noirs et les yeux bleus. Taille et Poids
1m80 pour 70 kilos. Musculature
Disons que je n'ai pas à me plaindre, je suis
musclé juste comme il faut pour séduire les jeunes filles.
musclé juste comme il faut pour séduire les jeunes filles.
Style vestimentaire
J'ai mon propre style, un mélange entre les rockeurs des années 50 et les fils de riche sous cocaïne d'aujourd'hui. J'vous assure que ça déchire.
Signe particulier
J'ai quelques cicatrices et un immense tatouage de tigre japonais dans le dos.
Gaspard Ulliel
MORE ABOUT ME
Quel est ton livre préféré ? Ton film préféré ?
Sans doute le Comte de Monte-Cristo d'Alexandre Dumas, j'aime également beaucoup Lorenzaccio de Musset. Pour ce qui est du film... Je vais dire les Affranchis de Scorsese !Quel est le genre de musique que tu écoutes ? Ta chanson préférée ?
J'adore la musique Alternative. Et je suppose que la musique Believer d'Imagine Dragons me convient bien et me plait beaucoup. Quel est ton plat préféré ? Ta boisson préférée ?
Je ne suis pas très difficile, et je ne voudrais pas paraître ridicule en disant "des frites" alors je vais dire quelque chose d'un peu pompeux qui sied à mon rang : Un bon Macdonald avec Chris ! Et toutes les boissons me plaisent tant qu'elles sont alcoolisées. Ton avis sur la religion ? La politique ? L'environnement ?
Tant de questions sans aucun intérêt. J'ai franchement l'air de me soucier de ça ? Je reconnais que, peut-être, la religion ne me laisse plus aussi indifférent qu'auparavant. Mais pour le reste... Ce n'est pas parce que mon père est ministre que je me dois d'avoir un avis sur la question. Ce que tu penses de l'homosexualité ? De l'infidélité ? De l'amour ?
Je n'ai rien contre l'homosexualité, au contraire. J'adore les nouvelles expériences et Chris trop mignon pour que je lui dise non. Je pense que le concept même de fidélité est sur-côté. Quel imbécile peut encore croire de nos jours que nous ne pouvons vivre qu'avec une seule et même personne pendant quatre-vingt ans ? Et l'amour, c'est un sentiment qui à la fois inconnu et familier. J'aime les femmes, un amour puissant, passionnel, qui ne dure qu'une nuit. Après, elles oublient de se taire et deviennent chiantes. Les femmes sont une source de problème, alors pourquoi devrais-je les aimer sur le long terme ? Les drogues ? L'alcool ? Les soirées ? Ton truc ou pas du tout ?
Évidemment. Quel adolescent n'aimerait pas ça ? Je m'arrange même pour organiser un maximum de soirée lorsque je passe mes vacances chez mon père. Sinon, je m'ennuierais. Au lycée, tu es plutôt perçu comme le clown ? Le rebelle ? Le geek ?
Le rebelle ? Je suppose... Les mauvais garçons, ça fait craquer les filles. Et puis comme ça, personne ne vient m'emmerder. Es-tu victime de harcèlement ? As-tu de nombreux amis ?
Je dirais plutôt que je fais partie des harceleurs. Ce n'est pas mon activité favorite et ça ne m'arrive pas souvent mais je n'hésite pas longtemps avant de foutre la trouille à un petit sportif en jogging. Il suffit juste de choisir ses adversaires. Je m'attaque seulement aux abrutis. Qu'ils soient populaires ou binoclards, je n'en ai rien à cirer. Pour les nombreux amis, je suppose que oui. La popularité attire forcément une meute d'idiots qui vient te coller aux basques. Peu m'importe, mon seul véritable ami, c'est Chris. Les autres sont là pour donner le change.
Ta plus grande qualité ? Ton plus grand défaut ?
Ma plus grande qualité ? Je dirais, mon optimisme à toutes épreuves. Et mon plus grand défaut... Il paraîtrait que je suis insupportable, enfin, c'est ce que l'on dit mais personnellement, je ne fais confiance qu'à l'avis de Chris sur ce point et il est toujours mon ami. Si ça ce n'est pas une preuve que je suis quelqu'un d'adorable, je ne sais pas ce qu'il vous faut. Parle-nous de ton caractère, dans les grandes lignes :
Puisque vous insistez, disons que je suis le genre de type dont il est impossible de définir le caractère, surtout dans les grandes lignes. Je suis inconstant, impulsif, irréfléchi. On pourrait me placer deux fois dans la même situation, j'aurais deux réactions différentes. Et aucune des deux ne serait venue à l'idée d'un mec normal. Ce qu'il faut comprendre c'est que je n'agirais jamais comme vous le voulez. Voire même, je prendrais souvent l'option la plus stupide et la plus inattendue possible. Je suis un provocateur irresponsable et ma chance me pousse à croire que mes actes n'auront jamais aucune conséquence. Je n'ai ni peur de me blesser, ni de mourir, donc je fais, et je dis n'importe quoi, n'importe quand. Je ne vis que pour ressentir de l'adrénaline, des frissons. Je ne sais pas me battre, mais je serai toujours le premier à commencer une baston. Sans risque, je n'éprouve aucun plaisir. Éprouver du plaisir, c'est être vivant. Bien sûr, tout ceci peut vous amener à penser que je suis totalement stupide, peut-être, mais, avouez que vous me trouvez fascinant. Tout ce que vous ne ferez jamais, moi je l'ai fait. J'ai vécu cent vies, pendant que restiez affalé sur votre canapé devant les anges de la téléréalité. N'est-ce pas intrigant ? Attirant ?
C'est exactement pour ça que je fais craquer les filles et que je ne me prive pas d'en profiter. Parce qu'en plus d'être un abruti inconscient, je suis un séducteur invétéré. Non pas que j'aime les femmes, au contraire, je suis plutôt macho et misogyne mais, le sexe... Une bonne partie de jambes en l'air, ça provoque autant de frisson que le braquage d'une épicerie. Et c'est un petit peu plus facile et moins risqué. Alors pourquoi se priver ? Et puis, l'autre avantage, c'est que ça m'évite de dormir seul. Que du plaisir... Si on oublie le réveil discret puis les insultes et les reproches. Comme si les filles ne savaient pas ce qui les attendaient en me tournant autour. J'ai vraiment l'air d'un type qui pourrait changer par amour ? Faut être naïve pour croire que je pourrais tomber amoureux. L'amour, c'est pour les poètes et les idéalistes. Personnellement, la réalité m'en a trop mis plein la gueule pour que l'amour s'invite dans ma vie. Il me faut des sensations extrêmes, sinon je ne ressens rien, et l'amour n'en fait pas partie.
Bon, je sais que le portrait que je vous dresse n'est pas très glorieux. Pour le moment, je suis un provocateur stupide, impulsif, insensible, sexiste et pervers. Ce qui est, sans aucun doute, la réalité. Il faudrait vraiment que je sois le pire des hypocrites pour vous dire qu'à côté de ça, je suis un ange courtois et obéissant. Non, à côté de ça, j'ai quelques qualités, comme tout le monde : Je suis très attaché à mes véritables amis, même s'ils sont rares. Et s'il arrivait malheur à Chris, je n'hésiterais pas très longtemps à voler à son secours tel un prince charmant sur son blanc destrier. Je suis plutôt doué en sociabilité. Je n'aime que très peu de gens, mais je sais me faire apprécier avec une facilité déconcertante. C'est à double tranchant, puisque je sais aussi me faire haïr avec une facilité déconcertante. Il n'y a pas de demi-mesure avec moi. Soit on m'adore, soit on me déteste.
Je suis également doté d'un optimisme à l'épreuve des balles et des coups de poings. Je n'ai peur de rien, ni de personne et je sais que tout finit toujours par s'arranger, pour peu que je me donne la peine d'y croire. Quoiqu'il advienne, garder le sourire me semble être la meilleure des solutions à mes problèmes. C'est une façon simple de dire "Je vais bien et tout ce que tu peux me faire n'a pas la moindre importance". C'est de l'auto-persuasion qui marche de mieux en mieux avec les années. J'ai aussi le sens de l'humour, j'adore les plaisanteries, les farces et je peux être immature quand je veux, c'est sans doute pour cela qu'on s'entend bien avec Chris. Ah, et peut-être que l'on pourrait également dire de moi que je suis courageux, parce que de l'extérieur, je dois en avoir l'air. Mais maintenant, vous savez que c'est une illusion provoquée par mon impatience, mon impulsivité, et aussi le fait que la mort n'existe pas dans mon monde.
Au lycée, je fais tout ce que je peux pour être insupportable avec les professeurs que je n'apprécie pas. Je m'attire des ennuis mieux que personne et j'ai déjà un casier judiciaire long comme le bras. Je peux être un sale con avec quelqu'un juste parce que sa tête ne me revient pas. Je m'amuse avec les filles et les largue sans aucune forme de pitié. Je sèche les cours, je participe à toutes les fêtes, je provoque des bagarres. De toute façon, je suis déjà considéré comme le mauvais garçon, alors autant le jouer jusqu'au bout. C'est un rôle qui me convient. Et je prends vraiment un monstrueux plaisir à ternir l'image de mon ministre de père.
En bref : Je ne suis pas quelqu'un de particulièrement agréable à fréquenter et je m'en contrefiche. Au fond, je sais que je ne suis pas quelqu'un de mauvais... Je me suis laissé guider par les circonstances, l'environnement... En devenant celui qui attaque, je m'autorise à ne plus être la victime.
- Benjamin Anderson
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YOUR STORY
LOVE HURTS
Et parfois, mon rêve se transforme en cauchemar...
Le soleil disparaît. L'horizon se drape de ses plus sombres atours. Seule la lune éclaire encore mon chemin. Sa lumière faiblit, à mesure que j'avance. Mes pas se font plus lourds. Mes mains se teintent d'un liquide rougeâtre. J'ai froid. La solitude m'enlace. Me terrorise.
La route que j'emprunte ne mène nulle part, mais je ne peux pas m'en détourner.
Une douleur dans la poitrine me déchire. Mon cœur se désagrège. Désormais, chaque mouvement est une torture. Du sang trouble ma vue, pénètre dans ma bouche. Je m'étouffe. Je m'écroule. Je rampe, vers un objectif qui n'existe pas. Vers une mort certaine.
(Vers Sa voix.)
Et Dieu dit : Ma colère sera satisfaite, j'assouvirai sur eux ma fureur, je me vengerai ; alors ils sauront que moi, l’Éternel, j'ai parlé dans ma colère, en répandant sur eux ma fureur. Ézéchiel 5.13
S'il est une chose constante chez mon paternel, c'est son inconstance. Il n'est pas irréfléchi, ni impulsif, il est imprévisible. Il séduit, laisse entrevoir une possibilité, et choisit d'agir à l'exact opposé. Il aurait fait un excellent Général des Armées. Stricte. Charismatique. Surprenant.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il n'est pas imbattable. Comme tout homme, il possède des faiblesses, des regrets... S'il lit en moi avec une facilité déconcertante, je peux me targuer d'en faire de même. Je suis malheureusement trop lâche pour lui tenir tête. Je préfère provoquer la tempête, et me laisser porter par le courant, plutôt que de me débattre dans les flots agités en espérant gagner contre le Dieu des Mers.
"Benjamin !"
Il arrive qu'une simple goutte d'eau, insignifiante, suffise à déclencher un ouragan.
"Papa, comme toujours, c'est un plaisir de te voir entrer dans ma chambre sans me prévenir au préalable, et sans frapper.
Avant toute chose, il faut comprendre que mon père ne peut pas se mettre en colère. Il est imperméable à toutes formes de provocation. J'irai même jusqu'à dire, qu'il est imperméable à toutes formes de sentiments humains. Bien sûr, il ressent des choses, tels que le plaisir, ou la frustration, pour le reste, il se contente de simuler. Il feint d'être le politicien que ses électeurs attendent, et il feint à la perfection.
De ce fait, je ne peux pas l'énerver.
Mais je l'amuse.
Alors, lorsque son fidèle assistant rentre chez lui, lorsqu'il s'est lassé de culbuter notre quarante-sixième femme de ménage, lorsqu'il ne trouve aucun ami pour aller boire un verre dans un club de strip-tease privé... C'est vers moi qu'il se tourne.
Avec un peu de courage, je pourrais le faire chuter de son piédestal, l'humilier en public, avant de planter un couteau dans son coeur. Avec un peu de courage, je pourrais effacer ce sourire amusé de ses lèvres... Celui qui me murmure :
(Divertis-moi, bouffon).
"Ma demeure, ma chambre, Benjamin. Dix-huit ans et tu n'as toujours pas compris cela ?
- Tu n'es pas sans savoir que je suis lent d'esprit.
Je lui souris également. Il secoue la tête.
- Veux-tu bien demander à la fille qui te taille une pipe sous la couette de partir ? La honte t'est étrangère, mais ce n'est peut-être pas le cas de cette pauvre enfant.
- Si je ne te détestais pas, je t'aurais proposé de nous rejoindre, papa. Tu m'as l'air tendu ce matin.
Je fais signe à la demoiselle de se redresser, elle plante ses beaux yeux verts dans ceux de mon père sans une once de pudeur. J'aime d'un amour tendre toutes les filles éduquées dans des écoles catholiques interdites aux garçons. Elles développent un goût inégalable pour la perversité.
- Et si cette fille n'était pas mineure, j'aurais sans doute accepté... Peut-elle nous laisser ?
- Pourquoi ne pas directement vous adresser à moi, Monsieur Anderson ?
La perversité, et l'audace. Le simple fait qu'elle puisse parler de la sorte à mon ministre de père me provoque une nouvelle érection.
- Navré Lizzie, mon père ne s'adresse qu'aux femmes qu'il a l'intention de baiser.
- Et comme dit l'adage, tel père, tel fils.
- Au moins une chose que nous avons en commun, je soupire, Lizzie, nous nous verrons demain ?
- Avec plaisir. Passe me prendre quand tu veux... Où tu veux.
Elle se mord la lèvre, me fait un clin d'oeil et sort du lit. Nue. Ravissante. Elle prend ses affaires, et s'approche de mon père.
- Puis-je sortir, Monsieur Anderson ?
Il consent à se décaler, non sans lui jeter un regard.
- Vous savez que vous valez bien mieux que mon fils, mademoiselle, n'est-ce pas ?
- Je sais, Monsieur Anderson, ne vous en faites pas, il n'est rien de plus qu'un gigolo à mes yeux. Mais, je vous remercie de votre sollicitude, cela me touche."
Elle se met sur la pointe des pieds, pose un baiser sur la joue de mon père et disparaît, non sans laisser un immense vide derrière elle. L'idée de passer une longue matinée en sa compagnie me plaisait d'avantage que celle de recevoir les remontrances de mon géniteur.
Je me lève à mon tour, Monsieur le Ministre fait l'effort de se retourner pour me laisser enfiler un jean.
"Si je t'ai mécontenté d'une quelconque façon, je suppose qu'il n'est pas indispensable que je mette une chemise...
- Qu'est-ce qui te fait croire que je suis mécontent ? Peut-être allais-je te féliciter ?
Sa plaisanterie le fait rire. Par bravade, je choisis de rire avec lui. Connard.
- Très amusant. Qu'ai-je donc encore fait ?
- Tu veux dire, outre ton comportement déplorable, tes renvois successifs de la seule école au monde qui ne peut pas te virer définitivement, tes arrestations et tes déboires en première page des magazines people, tes problèmes d'alcool, de drogue, de sexe et ta volonté de traîner mon nom dans la boue la plus crasse et la plus infâme de Londres ?
Un joli palmarès maintenant que j'y songe.
- Outre cela, oui.
Il sourit.
- Dans mon bureau, et ne prends pas la peine de t'habiller."
Je le suis, les mains dans les poches.
Au départ, tous mes débordements avaient pour projet de l'énerver. De lui rendre la vie infernale. De ruiner sa réputation. C'était sans compter sur son habileté et sa propension à toujours retomber sur ses pattes. Mes frasques ne l'ont pas rendu détestable. Elles m'ont rendu détestable. Et lui... Lui, il est devenu ce père aimant qui tente au mieux de protéger son fils à problème. Combien de fois ai-je entendu les gens autour de lui dire : "Ce n'est pas facile d'élever un enfant adopté, vous ne savez pas ce qu'il a vécu avant de vous avoir. Vous êtes si brave avec lui... Si patient."
Il est le héros.
Il est toujours le héros.
Je pénètre dans la pièce, il s'allume une cigarette.
Il ne me hait pas. Il se fiche de mes excès. Les raisons de me punir sont nombreuses, mais pas une ne semble valable à ses yeux. Rien ne l'atteint personnellement.
Pourtant, il me sourit, il retire sa ceinture et ...
Je me souviens que le simple fait d'exister peut être la source de sa contrariété.
La boucle en métal s'abat sur mes flans.
"Je ne t'entends pas compter.
Les poings fermement accrochés à l'étagère de sa foutue bibliothèque, je réfléchis avant de lui donner une réponse appropriée.
- N'ai-je pas passé l'âge de réviser mes mathématiques en ta compagnie ?
- Tant que tu ne sembles pas retenir la leçon, j'estime que la réponse est non. Compte. Haut et fort."
Ridicule.
(Sept, douze, vingt-six, trente-quatre, cinquante-neuf, soixante...)
"Attends...
Il s'arrête. Il tire sur sa cigarette. La douleur dans mon dos est à peine supportable.
- Fatigué, fils ?
Je respire difficilement, mais je ne veux pas le lui montrer.
- Certainement pas, papa... Tu perds un peu la main avec l'âge... Non, c'est juste que... Je ne parviens pas à me rappeler de la raison de cette punition. Ne serait-il pas plus correct de me dire pourquoi tu fais cela ?
Il éclate de rire.
- Je me demandais quand tu allais daigner poser la question."
Tout ceci n'a toujours été qu'un jeu malsain dans lequel il se défoule de ses pulsions sadiques. Mais d'habitude, il se trouve une excuse. Il fait semblant de ne pas faire cela pour le plaisir. Il fait semblant de m'éduquer. De me rendre meilleur...
"Assis.
Je me retourne. Il est appuyé contre son bureau et me fait signe de m'installer face à lui.
- Aurais-je un morceau de sucre si j'obéis ?
- Bien sûr, un bâtard bien dressé mérite sa récompense.
Inutile de discuter. Je fais ce qu'il ordonne. Il me tend une cigarette, qu'il allume. Je suis obligé de lever les yeux pour le regarder, et je suis certain qu'il adore cette situation.
- Ouaf.
Il secoue la tête, amusé. Ai-je bien rempli mon rôle de bouffon, monseigneur ?
- Pourquoi ne m'as-tu pas posé la question plus tôt ?
Je lui offre mon plus beau sourire.
- Je ne voulais pas briser la magie de cet instant privilégié entre nous. C'est mon côté fleur bleue.
- Tu es un imbécile.
- Cela va sans dire."
D'un geste presque tendre, il retire sa veste et me la donne. Souffler le chaud et le froid, l'une de ses grandes spécialités. Il tient le bâton d'une main, le bonbon de l'autre. Tel un Dieu omniscient qui punit et qui félicite.
L’Éternel est miséricordieux et juste, Notre Dieu est plein de compassion. Psaume 116.5
Je me souviens de ma mère. Une femme magnifique, avec de longs cheveux d'ébènes et des yeux noirs et profonds. Elle était une gitane espagnole belle et fière. Elle m'a donné naissance et elle m'a élevé dans son camp. Je me souviens des rires, des chants, et des danses. Je me souviens de la joie de vivre que je ressentais à cette époque-là. Je me souviens de son amour. Surtout de son amour. Chaud. Lumineux.
(Viens Benjamin, il n'y a plus rien qui te rattache à cet endroit désormais...)
Ma mère est morte. Emportant mon cœur avec elle. J'avais six ans.
"Tu es fascinant, Benjamin. À la fois sauvage et indomptable en public, mais si prompt à m'obéir en privé. Tu n'as jamais versé une larme, pas une fois. Tu es fier et orgueilleux, comme l'était ta mère... Et pourtant, au lieu de t'enfuir loin de moi dès que tu en as eu l'occasion, tu as préféré rester... Tu continues à t'agenouiller lorsque je t'en donne l'ordre, et tu n'as plus besoin de raison, tu endures sans sourciller mes punitions. Même un chien ne serait pas aussi fidèle."
À ma naissance, ma mère m'a appelé Ben. Lorsque mon père m'a adopté, se faisant passer pour le gentil chevalier qui sauve un pauvre orphelin d'un camp de gitans, il a inscrit Benjamin. Benjamin ne possédait plus rien, alors il s'est raccroché à ce qu'il a pu.
Je souffle la fumée de ma cigarette dans sa direction.
"Je ne parviens pas à comprendre si tu es en train de te vanter ou de te plaindre de m'avoir trop bien dressé ? À l'image d'une jeune et jolie femme battue, j'invente des histoires pour te couvrir, je souris lorsque tout va mal, et je ne cherche pas à échapper à ton influence. Ne suis-je pas le fils dont tu rêvais ?
- Définitivement.
Je lui souris et m'affale dans mon siège avant de me redresser en grimaçant.
- Alors, ai-je le droit de savoir pourquoi tu m'as privé d'une matinée agréable en compagnie de Lizzie ? Tu désirais juste t'amuser à mes dépends, encore une fois ?
Il fait le tour de son bureau et s'assoit dans son fauteuil de ministre. J'en déduis que la discussion risque d'être longue.
- Sais-tu pourquoi je t'ai adopté, Benjamin ?
- Pour m'emmerder, sans aucun doute.
- Ton langage.
Sérieusement ?
- Navré, cela m'a échappé... Peut-être voulais-tu un punching-ball qui parle ?
- Hilarant. Es-tu aussi malheureux que tu le prétends ? Regarde les choses en face, fils, tu es nourri, bien logé, protégé. Tu n'as jamais fait de prison, tu n'as jamais manqué de rien. Je suis certain que dans ton lycée, de nombreux enfants sont plus maltraités que tu ne l'as été.
- Si tu vas par-là, Mao a fait plus de morts avec le communisme qu'Hitler avec les nazis, ce n'est pas pour cette raison que les nazis sont plus fréquentables.
- Tu ne serais pas l'homme que tu es aujourd'hui sans cette éducation.
J'écrase ma cigarette dans son cendrier.
- Tu veux dire que je ne serais pas ce gamin lâche qui a mouillé son lit jusqu'à ses douze ans ? Qui fait encore des cauchemars ? Qui préfère s'entourer d'inconnus et de nymphomanes plutôt que de supporter la solitude ? Qui n'attend qu'une chose : pouvoir planter un couteau dans le coeur de son géniteur sans jamais oser le faire ? Mince, tu as raison, heureusement que je n'ai pas raté cela, quel adolescent voudrait être équilibré, aimé et heureux quand il pourrait être moi ?
Je lis dans la surprise dans son regard. Puis, il fronce les sourcils.
- Ce n'est pas tout à fait ainsi que je vois les choses... Tu es un adolescent charismatique, persuasif. Tu n'as peur de rien, ni de personne. Tu possèdes une intelligence hors du commun, qui te permet de te sortir d'à peu près toutes les situations...
- Merde papa, tu es certain qu'aucune partie de ton corps n'est paralysée ? Tes propos sont totalement incohérents, j'ai peur que tu ne sois en train de faire un AVC... Veux-tu que j'appelle un médecin ?
Il soupire, ennuyé par mon intervention.
- Évite de me couper la parole, et surveille ton langage, nous ne sommes pas des...
- Gitans ?
- Par exemple.
- Excuse-moi, mais tu ne peux pas me faire ce genre de compliments et t'attendre à ce que cela me laisse de marbre. Je ne vois que deux raisons à un discours aussi encourageant et positif : Tu comptes me virer de ta demeure, et tu ne voulais pas que nous nous séparions fâchés, ou bien ... Tu vas me demander quelque chose.
- Je suis démasqué...
- Je ne te sucerais pas.
Il esquisse un sourire.
- Je ne veux même pas savoir pourquoi cette possibilité t'est venue à l'esprit... Parfois, je me demande si tu mesures le degré de noirceur de tes propos. Mais si tu réponds de cette manière à tes professeurs, je comprends mieux les innombrables remarques sur ton comportement.
- Il m'est difficile d'admettre que tu comprends mieux mon humour qu'eux.
- Fils, tu serais déjà mort si je n’avais pas trouvé tes provocations amusantes.
Il lâche ces mots, telle une balle qui m’atteindrait en plein cœur. S’il n’avait pas été atrophié, Dieu seul sait à quel point l’expérience aurait pu être douloureuse.
- Que dois-je en déduire, tu comptes faire de moi ton bouffon ?
- L’idée est tentante, mais tu me seras plus utile dans un autre domaine.
- Donc je vais travailler pour toi ?
- Tu vas travailler pour moi."
Pendant une fraction de seconde, l’air s’est échappé de mes poumons.
(Offre-moi ton âme).
Et cela n'est pas étonnant, puisque Satan lui-même se déguise en Ange de Lumière. 2 Corinthiens 11.14
Ma mère a mis fin à ses jours. Durant des années, je me suis demandé si je n'allais pas suivre ses pas... Marcher debout sur l'arête du toit. Rester sur les rails jusqu'à ce que le train arrive. Traverser la route les yeux bandés... Tous mes excès, toutes mes folies, sont des tentatives de suicide avortées. Des tentatives de suicide pour les lâches. Ceux qui préfèrent s'en remettre à la chance, plutôt que de planter directement un couteau dans leur veine.
J'ai toujours été un homme chanceux.
Je remercie le Ciel de faire durer le plaisir.
Au fond de moi, Ben hurle. Sa voix de petit garçon effrayé me paralyse. Accepter, et vendre mon âme au Diable. Refuser, et gagner ma liberté... Le choix semble si simple. Il m'offre la possibilité de partir sur un plateau d'argent. J'ai attendu cela toute ma vie...
Alors pourquoi ne puis-je pas dire non ?
"Quel genre de travail ?
J'ai déjà dit oui. Il le sait. J'aurais tellement aimé être plus courageux...
- Du genre qui ne te plaira pas. Quelle est ma profession, Benjamin ?
Il se sert un verre de bourbon. Une habitude aussi difficile à combattre que la cigarette. Pour lui, comme pour moi. J’ai hérité de ses vices.
- Tu es ministre des affaires étrangères ?
- Pas celle-là. L’autre.
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Je crois que si. Pendant onze ans, tu es entré dans cette pièce sans ma permission. Tu as fouillé dans mes affaires, lu des documents qui ne t’étaient pas destiné, vu des choses que tu n’aurais pas dû voir… Et jusqu’à aujourd’hui, je n’avais pas compris pourquoi tu avais gardé ces informations pour toi, au lieu de les rendre publiques.
La loyauté est la pire des qualités, elle ne nécessite pas de réciprocité. À l’image d’une pute naïve. Elle se donne pour faire plaisir aux autres, sans se rendre compte qu’à la fin, c’est toujours elle qui se fait baiser comme une chienne.
- Je suppose que tu trempes dans des affaires criminelles...
Il sourit, sans rien admettre. Les hommes tels que lui ne peuvent pas devenir aussi puissants sans un soupçon de paranoïa.
- Dans la vie, nous faisons tous des choix, Benjamin. Aujourd’hui, je t’offre l’opportunité de décider de ton avenir. Tu peux travailler pour moi, mais tu n’auras pas le beau rôle.
- Nous sommes d’accord, tu n’es pas en train de me proposer d’être ton assistant au ministère ?
Il secoue la tête.
- Entre nous, fils, as-tu déjà songé à ce que tu seras dans dix ans ?
- J’aurais bien aimé…
- Faire des études ? Premièrement, je n’ai aucune raison de te payer une école, tu as un casier judiciaire long comme le bras et toute ton adolescence a été un Enfer pour ta mère et moi, je pourrais te jeter dehors à tes dix-huit ans, personne ne s’en émouvrait. Deuxièmement, réfléchis juste une seconde, tu étudierais l’art, ou l’histoire… Et alors que ferais-tu ? Professeur ? Conservateur ? Je t’imagine très bien passer tes journées dans un musée ou une salle de classe…
Son monologue me poignarde en plein cœur. Jusqu’ici, je ne m’étais pas rendu compte que mes chances de faire des études étaient si nulles. J’avais naïvement cru que… Que j’aurais pu avoir une vie normale après lui. J’aurais dû me douter qu’il désirait rentabiliser son investissement. Adopter un bâtard et ne rien en tirer, c’est une perte sèche.
- Je suis…
- Un futur criminel. Dans dix ans, à ce rythme, sans papa pour te couvrir, tu seras en prison.
- Tu devrais revoir tes méthodes d’éducation. Je suis sûr qu’il est néfaste de dire à son enfant qu’il sera en taule à vingt-sept ans…
- Je te propose une alternative.
- Si je peux me permettre, dans les deux cas, je suis un criminel.
- Comme si l’idée te déplaisait.
- Tu ne peux pas profiter de ma propension à faire des conneries pour en tirer un profit personnel.
- Bien sûr que je le peux. Tu auras la vie trépidante dont tu rêves, même si je ne te cache pas que tu risques de devoir commettre des actes dont tu ne seras pas fier...
Il me tend la main. Nos regards se croisent.
- Si j'accepte, cela signifie que c'en est terminé des punitions aléatoires et des remarques désobligeantes ?
- Terminé. Nous sommes deux adultes, désormais, nous réglerons nos comptes en tant que tels."
Je serre sa main.
(Bon garçon).
La route que j'emprunte ne mène nulle part, mais je ne peux pas m'en détourner.
Une douleur dans la poitrine me déchire. Mon cœur se désagrège. Désormais, chaque mouvement est une torture. Du sang trouble ma vue, pénètre dans ma bouche. Je m'étouffe. Je m'écroule. Je rampe, vers un objectif qui n'existe pas. Vers une mort certaine.
(Vers Sa voix.)
Et Dieu dit : Ma colère sera satisfaite, j'assouvirai sur eux ma fureur, je me vengerai ; alors ils sauront que moi, l’Éternel, j'ai parlé dans ma colère, en répandant sur eux ma fureur. Ézéchiel 5.13
S'il est une chose constante chez mon paternel, c'est son inconstance. Il n'est pas irréfléchi, ni impulsif, il est imprévisible. Il séduit, laisse entrevoir une possibilité, et choisit d'agir à l'exact opposé. Il aurait fait un excellent Général des Armées. Stricte. Charismatique. Surprenant.
Contrairement à ce que l'on pourrait croire, il n'est pas imbattable. Comme tout homme, il possède des faiblesses, des regrets... S'il lit en moi avec une facilité déconcertante, je peux me targuer d'en faire de même. Je suis malheureusement trop lâche pour lui tenir tête. Je préfère provoquer la tempête, et me laisser porter par le courant, plutôt que de me débattre dans les flots agités en espérant gagner contre le Dieu des Mers.
"Benjamin !"
Il arrive qu'une simple goutte d'eau, insignifiante, suffise à déclencher un ouragan.
"Papa, comme toujours, c'est un plaisir de te voir entrer dans ma chambre sans me prévenir au préalable, et sans frapper.
Avant toute chose, il faut comprendre que mon père ne peut pas se mettre en colère. Il est imperméable à toutes formes de provocation. J'irai même jusqu'à dire, qu'il est imperméable à toutes formes de sentiments humains. Bien sûr, il ressent des choses, tels que le plaisir, ou la frustration, pour le reste, il se contente de simuler. Il feint d'être le politicien que ses électeurs attendent, et il feint à la perfection.
De ce fait, je ne peux pas l'énerver.
Mais je l'amuse.
Alors, lorsque son fidèle assistant rentre chez lui, lorsqu'il s'est lassé de culbuter notre quarante-sixième femme de ménage, lorsqu'il ne trouve aucun ami pour aller boire un verre dans un club de strip-tease privé... C'est vers moi qu'il se tourne.
Avec un peu de courage, je pourrais le faire chuter de son piédestal, l'humilier en public, avant de planter un couteau dans son coeur. Avec un peu de courage, je pourrais effacer ce sourire amusé de ses lèvres... Celui qui me murmure :
(Divertis-moi, bouffon).
"Ma demeure, ma chambre, Benjamin. Dix-huit ans et tu n'as toujours pas compris cela ?
- Tu n'es pas sans savoir que je suis lent d'esprit.
Je lui souris également. Il secoue la tête.
- Veux-tu bien demander à la fille qui te taille une pipe sous la couette de partir ? La honte t'est étrangère, mais ce n'est peut-être pas le cas de cette pauvre enfant.
- Si je ne te détestais pas, je t'aurais proposé de nous rejoindre, papa. Tu m'as l'air tendu ce matin.
Je fais signe à la demoiselle de se redresser, elle plante ses beaux yeux verts dans ceux de mon père sans une once de pudeur. J'aime d'un amour tendre toutes les filles éduquées dans des écoles catholiques interdites aux garçons. Elles développent un goût inégalable pour la perversité.
- Et si cette fille n'était pas mineure, j'aurais sans doute accepté... Peut-elle nous laisser ?
- Pourquoi ne pas directement vous adresser à moi, Monsieur Anderson ?
La perversité, et l'audace. Le simple fait qu'elle puisse parler de la sorte à mon ministre de père me provoque une nouvelle érection.
- Navré Lizzie, mon père ne s'adresse qu'aux femmes qu'il a l'intention de baiser.
- Et comme dit l'adage, tel père, tel fils.
- Au moins une chose que nous avons en commun, je soupire, Lizzie, nous nous verrons demain ?
- Avec plaisir. Passe me prendre quand tu veux... Où tu veux.
Elle se mord la lèvre, me fait un clin d'oeil et sort du lit. Nue. Ravissante. Elle prend ses affaires, et s'approche de mon père.
- Puis-je sortir, Monsieur Anderson ?
Il consent à se décaler, non sans lui jeter un regard.
- Vous savez que vous valez bien mieux que mon fils, mademoiselle, n'est-ce pas ?
- Je sais, Monsieur Anderson, ne vous en faites pas, il n'est rien de plus qu'un gigolo à mes yeux. Mais, je vous remercie de votre sollicitude, cela me touche."
Elle se met sur la pointe des pieds, pose un baiser sur la joue de mon père et disparaît, non sans laisser un immense vide derrière elle. L'idée de passer une longue matinée en sa compagnie me plaisait d'avantage que celle de recevoir les remontrances de mon géniteur.
Je me lève à mon tour, Monsieur le Ministre fait l'effort de se retourner pour me laisser enfiler un jean.
"Si je t'ai mécontenté d'une quelconque façon, je suppose qu'il n'est pas indispensable que je mette une chemise...
- Qu'est-ce qui te fait croire que je suis mécontent ? Peut-être allais-je te féliciter ?
Sa plaisanterie le fait rire. Par bravade, je choisis de rire avec lui. Connard.
- Très amusant. Qu'ai-je donc encore fait ?
- Tu veux dire, outre ton comportement déplorable, tes renvois successifs de la seule école au monde qui ne peut pas te virer définitivement, tes arrestations et tes déboires en première page des magazines people, tes problèmes d'alcool, de drogue, de sexe et ta volonté de traîner mon nom dans la boue la plus crasse et la plus infâme de Londres ?
Un joli palmarès maintenant que j'y songe.
- Outre cela, oui.
Il sourit.
- Dans mon bureau, et ne prends pas la peine de t'habiller."
Je le suis, les mains dans les poches.
Au départ, tous mes débordements avaient pour projet de l'énerver. De lui rendre la vie infernale. De ruiner sa réputation. C'était sans compter sur son habileté et sa propension à toujours retomber sur ses pattes. Mes frasques ne l'ont pas rendu détestable. Elles m'ont rendu détestable. Et lui... Lui, il est devenu ce père aimant qui tente au mieux de protéger son fils à problème. Combien de fois ai-je entendu les gens autour de lui dire : "Ce n'est pas facile d'élever un enfant adopté, vous ne savez pas ce qu'il a vécu avant de vous avoir. Vous êtes si brave avec lui... Si patient."
Il est le héros.
Il est toujours le héros.
Je pénètre dans la pièce, il s'allume une cigarette.
Il ne me hait pas. Il se fiche de mes excès. Les raisons de me punir sont nombreuses, mais pas une ne semble valable à ses yeux. Rien ne l'atteint personnellement.
Pourtant, il me sourit, il retire sa ceinture et ...
Je me souviens que le simple fait d'exister peut être la source de sa contrariété.
La boucle en métal s'abat sur mes flans.
"Je ne t'entends pas compter.
Les poings fermement accrochés à l'étagère de sa foutue bibliothèque, je réfléchis avant de lui donner une réponse appropriée.
- N'ai-je pas passé l'âge de réviser mes mathématiques en ta compagnie ?
- Tant que tu ne sembles pas retenir la leçon, j'estime que la réponse est non. Compte. Haut et fort."
Ridicule.
(Sept, douze, vingt-six, trente-quatre, cinquante-neuf, soixante...)
"Attends...
Il s'arrête. Il tire sur sa cigarette. La douleur dans mon dos est à peine supportable.
- Fatigué, fils ?
Je respire difficilement, mais je ne veux pas le lui montrer.
- Certainement pas, papa... Tu perds un peu la main avec l'âge... Non, c'est juste que... Je ne parviens pas à me rappeler de la raison de cette punition. Ne serait-il pas plus correct de me dire pourquoi tu fais cela ?
Il éclate de rire.
- Je me demandais quand tu allais daigner poser la question."
Tout ceci n'a toujours été qu'un jeu malsain dans lequel il se défoule de ses pulsions sadiques. Mais d'habitude, il se trouve une excuse. Il fait semblant de ne pas faire cela pour le plaisir. Il fait semblant de m'éduquer. De me rendre meilleur...
"Assis.
Je me retourne. Il est appuyé contre son bureau et me fait signe de m'installer face à lui.
- Aurais-je un morceau de sucre si j'obéis ?
- Bien sûr, un bâtard bien dressé mérite sa récompense.
Inutile de discuter. Je fais ce qu'il ordonne. Il me tend une cigarette, qu'il allume. Je suis obligé de lever les yeux pour le regarder, et je suis certain qu'il adore cette situation.
- Ouaf.
Il secoue la tête, amusé. Ai-je bien rempli mon rôle de bouffon, monseigneur ?
- Pourquoi ne m'as-tu pas posé la question plus tôt ?
Je lui offre mon plus beau sourire.
- Je ne voulais pas briser la magie de cet instant privilégié entre nous. C'est mon côté fleur bleue.
- Tu es un imbécile.
- Cela va sans dire."
D'un geste presque tendre, il retire sa veste et me la donne. Souffler le chaud et le froid, l'une de ses grandes spécialités. Il tient le bâton d'une main, le bonbon de l'autre. Tel un Dieu omniscient qui punit et qui félicite.
L’Éternel est miséricordieux et juste, Notre Dieu est plein de compassion. Psaume 116.5
Je me souviens de ma mère. Une femme magnifique, avec de longs cheveux d'ébènes et des yeux noirs et profonds. Elle était une gitane espagnole belle et fière. Elle m'a donné naissance et elle m'a élevé dans son camp. Je me souviens des rires, des chants, et des danses. Je me souviens de la joie de vivre que je ressentais à cette époque-là. Je me souviens de son amour. Surtout de son amour. Chaud. Lumineux.
(Viens Benjamin, il n'y a plus rien qui te rattache à cet endroit désormais...)
Ma mère est morte. Emportant mon cœur avec elle. J'avais six ans.
"Tu es fascinant, Benjamin. À la fois sauvage et indomptable en public, mais si prompt à m'obéir en privé. Tu n'as jamais versé une larme, pas une fois. Tu es fier et orgueilleux, comme l'était ta mère... Et pourtant, au lieu de t'enfuir loin de moi dès que tu en as eu l'occasion, tu as préféré rester... Tu continues à t'agenouiller lorsque je t'en donne l'ordre, et tu n'as plus besoin de raison, tu endures sans sourciller mes punitions. Même un chien ne serait pas aussi fidèle."
À ma naissance, ma mère m'a appelé Ben. Lorsque mon père m'a adopté, se faisant passer pour le gentil chevalier qui sauve un pauvre orphelin d'un camp de gitans, il a inscrit Benjamin. Benjamin ne possédait plus rien, alors il s'est raccroché à ce qu'il a pu.
Je souffle la fumée de ma cigarette dans sa direction.
"Je ne parviens pas à comprendre si tu es en train de te vanter ou de te plaindre de m'avoir trop bien dressé ? À l'image d'une jeune et jolie femme battue, j'invente des histoires pour te couvrir, je souris lorsque tout va mal, et je ne cherche pas à échapper à ton influence. Ne suis-je pas le fils dont tu rêvais ?
- Définitivement.
Je lui souris et m'affale dans mon siège avant de me redresser en grimaçant.
- Alors, ai-je le droit de savoir pourquoi tu m'as privé d'une matinée agréable en compagnie de Lizzie ? Tu désirais juste t'amuser à mes dépends, encore une fois ?
Il fait le tour de son bureau et s'assoit dans son fauteuil de ministre. J'en déduis que la discussion risque d'être longue.
- Sais-tu pourquoi je t'ai adopté, Benjamin ?
- Pour m'emmerder, sans aucun doute.
- Ton langage.
Sérieusement ?
- Navré, cela m'a échappé... Peut-être voulais-tu un punching-ball qui parle ?
- Hilarant. Es-tu aussi malheureux que tu le prétends ? Regarde les choses en face, fils, tu es nourri, bien logé, protégé. Tu n'as jamais fait de prison, tu n'as jamais manqué de rien. Je suis certain que dans ton lycée, de nombreux enfants sont plus maltraités que tu ne l'as été.
- Si tu vas par-là, Mao a fait plus de morts avec le communisme qu'Hitler avec les nazis, ce n'est pas pour cette raison que les nazis sont plus fréquentables.
- Tu ne serais pas l'homme que tu es aujourd'hui sans cette éducation.
J'écrase ma cigarette dans son cendrier.
- Tu veux dire que je ne serais pas ce gamin lâche qui a mouillé son lit jusqu'à ses douze ans ? Qui fait encore des cauchemars ? Qui préfère s'entourer d'inconnus et de nymphomanes plutôt que de supporter la solitude ? Qui n'attend qu'une chose : pouvoir planter un couteau dans le coeur de son géniteur sans jamais oser le faire ? Mince, tu as raison, heureusement que je n'ai pas raté cela, quel adolescent voudrait être équilibré, aimé et heureux quand il pourrait être moi ?
Je lis dans la surprise dans son regard. Puis, il fronce les sourcils.
- Ce n'est pas tout à fait ainsi que je vois les choses... Tu es un adolescent charismatique, persuasif. Tu n'as peur de rien, ni de personne. Tu possèdes une intelligence hors du commun, qui te permet de te sortir d'à peu près toutes les situations...
- Merde papa, tu es certain qu'aucune partie de ton corps n'est paralysée ? Tes propos sont totalement incohérents, j'ai peur que tu ne sois en train de faire un AVC... Veux-tu que j'appelle un médecin ?
Il soupire, ennuyé par mon intervention.
- Évite de me couper la parole, et surveille ton langage, nous ne sommes pas des...
- Gitans ?
- Par exemple.
- Excuse-moi, mais tu ne peux pas me faire ce genre de compliments et t'attendre à ce que cela me laisse de marbre. Je ne vois que deux raisons à un discours aussi encourageant et positif : Tu comptes me virer de ta demeure, et tu ne voulais pas que nous nous séparions fâchés, ou bien ... Tu vas me demander quelque chose.
- Je suis démasqué...
- Je ne te sucerais pas.
Il esquisse un sourire.
- Je ne veux même pas savoir pourquoi cette possibilité t'est venue à l'esprit... Parfois, je me demande si tu mesures le degré de noirceur de tes propos. Mais si tu réponds de cette manière à tes professeurs, je comprends mieux les innombrables remarques sur ton comportement.
- Il m'est difficile d'admettre que tu comprends mieux mon humour qu'eux.
- Fils, tu serais déjà mort si je n’avais pas trouvé tes provocations amusantes.
Il lâche ces mots, telle une balle qui m’atteindrait en plein cœur. S’il n’avait pas été atrophié, Dieu seul sait à quel point l’expérience aurait pu être douloureuse.
- Que dois-je en déduire, tu comptes faire de moi ton bouffon ?
- L’idée est tentante, mais tu me seras plus utile dans un autre domaine.
- Donc je vais travailler pour toi ?
- Tu vas travailler pour moi."
Pendant une fraction de seconde, l’air s’est échappé de mes poumons.
(Offre-moi ton âme).
Et cela n'est pas étonnant, puisque Satan lui-même se déguise en Ange de Lumière. 2 Corinthiens 11.14
Ma mère a mis fin à ses jours. Durant des années, je me suis demandé si je n'allais pas suivre ses pas... Marcher debout sur l'arête du toit. Rester sur les rails jusqu'à ce que le train arrive. Traverser la route les yeux bandés... Tous mes excès, toutes mes folies, sont des tentatives de suicide avortées. Des tentatives de suicide pour les lâches. Ceux qui préfèrent s'en remettre à la chance, plutôt que de planter directement un couteau dans leur veine.
J'ai toujours été un homme chanceux.
Je remercie le Ciel de faire durer le plaisir.
Au fond de moi, Ben hurle. Sa voix de petit garçon effrayé me paralyse. Accepter, et vendre mon âme au Diable. Refuser, et gagner ma liberté... Le choix semble si simple. Il m'offre la possibilité de partir sur un plateau d'argent. J'ai attendu cela toute ma vie...
Alors pourquoi ne puis-je pas dire non ?
"Quel genre de travail ?
J'ai déjà dit oui. Il le sait. J'aurais tellement aimé être plus courageux...
- Du genre qui ne te plaira pas. Quelle est ma profession, Benjamin ?
Il se sert un verre de bourbon. Une habitude aussi difficile à combattre que la cigarette. Pour lui, comme pour moi. J’ai hérité de ses vices.
- Tu es ministre des affaires étrangères ?
- Pas celle-là. L’autre.
- Je ne vois pas de quoi tu parles.
- Je crois que si. Pendant onze ans, tu es entré dans cette pièce sans ma permission. Tu as fouillé dans mes affaires, lu des documents qui ne t’étaient pas destiné, vu des choses que tu n’aurais pas dû voir… Et jusqu’à aujourd’hui, je n’avais pas compris pourquoi tu avais gardé ces informations pour toi, au lieu de les rendre publiques.
La loyauté est la pire des qualités, elle ne nécessite pas de réciprocité. À l’image d’une pute naïve. Elle se donne pour faire plaisir aux autres, sans se rendre compte qu’à la fin, c’est toujours elle qui se fait baiser comme une chienne.
- Je suppose que tu trempes dans des affaires criminelles...
Il sourit, sans rien admettre. Les hommes tels que lui ne peuvent pas devenir aussi puissants sans un soupçon de paranoïa.
- Dans la vie, nous faisons tous des choix, Benjamin. Aujourd’hui, je t’offre l’opportunité de décider de ton avenir. Tu peux travailler pour moi, mais tu n’auras pas le beau rôle.
- Nous sommes d’accord, tu n’es pas en train de me proposer d’être ton assistant au ministère ?
Il secoue la tête.
- Entre nous, fils, as-tu déjà songé à ce que tu seras dans dix ans ?
- J’aurais bien aimé…
- Faire des études ? Premièrement, je n’ai aucune raison de te payer une école, tu as un casier judiciaire long comme le bras et toute ton adolescence a été un Enfer pour ta mère et moi, je pourrais te jeter dehors à tes dix-huit ans, personne ne s’en émouvrait. Deuxièmement, réfléchis juste une seconde, tu étudierais l’art, ou l’histoire… Et alors que ferais-tu ? Professeur ? Conservateur ? Je t’imagine très bien passer tes journées dans un musée ou une salle de classe…
Son monologue me poignarde en plein cœur. Jusqu’ici, je ne m’étais pas rendu compte que mes chances de faire des études étaient si nulles. J’avais naïvement cru que… Que j’aurais pu avoir une vie normale après lui. J’aurais dû me douter qu’il désirait rentabiliser son investissement. Adopter un bâtard et ne rien en tirer, c’est une perte sèche.
- Je suis…
- Un futur criminel. Dans dix ans, à ce rythme, sans papa pour te couvrir, tu seras en prison.
- Tu devrais revoir tes méthodes d’éducation. Je suis sûr qu’il est néfaste de dire à son enfant qu’il sera en taule à vingt-sept ans…
- Je te propose une alternative.
- Si je peux me permettre, dans les deux cas, je suis un criminel.
- Comme si l’idée te déplaisait.
- Tu ne peux pas profiter de ma propension à faire des conneries pour en tirer un profit personnel.
- Bien sûr que je le peux. Tu auras la vie trépidante dont tu rêves, même si je ne te cache pas que tu risques de devoir commettre des actes dont tu ne seras pas fier...
Il me tend la main. Nos regards se croisent.
- Si j'accepte, cela signifie que c'en est terminé des punitions aléatoires et des remarques désobligeantes ?
- Terminé. Nous sommes deux adultes, désormais, nous réglerons nos comptes en tant que tels."
Je serre sa main.
(Bon garçon).
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